Après la découverte du fameux vin jaune, partons explorer les grands terroirs du Jura. Cette région, désormais sur le devant de la scène, regorge de grands vignerons. Et la dégustation ne laissera personne indifférent !
Les origines géologiques du vignoble
Longtemps méconnue, cette région a réussi à séduire les amateurs de vin ces dernières années. Alors que les prix des Chardonnay et Pinot Noir de Bourgogne explosent, l’alternative du Jura apparaît évidente. Ces deux régions n’en formaient autrefois qu’une, mais la tectonique des plaques les a séparées. La couche géologique présente en Bourgogne — le Bajocien — se trouve aussi dans le Jura, à haute altitude.
La différence est que les couches géologiques inférieures (plus anciennes) y sont également affleurantes, à plus basse altitude. Il s’agit de marnes du Lias et de marnes du Trias.
L’impact du terroir sur le goût et la texture des différents cépages
Le même cépage planté sur ces différents sols donne donc des expressions bien distinctes. Les vignerons jurassiens présentent de plus en plus de cuvées parcellaires. Ils visent ainsi à restituer la complexité des différents terroirs du Jura. C’est notamment le cas de Stéphane Tissot, dont nous aimons beaucoup le travail chez Chais d’œuvre ! Il démontre, entre autres, que le Chardonnay s’épanouit sur toute la diversité de sols du Jura.
Le Chardonnay
Ses Chardonnay issus des terroirs argileux du Trias présentent une grande puissance, des notes épicées et fumées, et une acidité salivante qui tranche la texture grasse des vins. C’est le profil de la cuvée Les Bruyères, notamment. Selon Manuel Peyrondet, « La trame acidulée, le contraste d’onctuosité, la rétro-olfaction… Tout colle parfaitement ! C’est l’immense blanc qu’il faut avoir dans sa cave pour bluffer ses amis à l’aveugle ! »
Ses Chardonnay issus des calcaires du Bajocien sont moins amples, plus frais et minéraux. Ils se rapprochent du « style bourguignon ». C’est ce que l’on trouve dans Les Graviers, par exemple. Manuel résume simplement la comparaison entre ces deux cuvées : « Stéphane Tissot transcende littéralement les Chardonnay par une patte bourguignonne qui impressionne systématiquement. Dans la gamme, il y a Les Bruyères, toujours impressionnant de puissance, puis Les Graviers, plus sapide et plus minéral. »
La Mailloche ou Sursis, issues d’argiles du Lias, se situent entre ces deux styles, équilibrées entre puissance et tension, entre argile et calcaire.
Le Savagnin, version ouillée
L’autre grand cépage blanc du Jura est le Savagnin, à l’origine des grands vins jaunes, mais pas seulement. Il est de plus en plus travaillé ouillé, dans le style non-oxydatif. Il donne alors des vins très frais, avec une acidité vive, et de superbes arômes floraux, fruités… Et une diversité infinie de styles selon les parcelles et les vignerons. À l’aveugle, le terroir peut prendre le dessus et semer le doute entre Savagnin et Chardonnay du Jura. Sinon, son aromatique peut se rapprocher de celle des cépages desquels il est l’ancêtre : Sauvignon, Chenin, Grüner Veltliner.
Les blancs, à table
Les blancs du Jura, à base de Chardonnay ou de Savagnin, formeront un mariage idéal avec les grands fromages. Privilégiez les pâtes pressées cuites : Comté, Beaufort, tomme d’Abondance… Les blancs les plus délicats seront parfaits pour accompagner de beaux poissons, rôtis au beurre, avec une garniture automnale. Gardez les plus puissants pour les volailles à la crème et aux champignons. Les blancs de la région sont relativement puissants ; à l’inverse, les rouges se montrent souvent très légers, frais, emplis de finesse, très buvables et digestes. La parenté des vignobles bourguignon et jurassien, outre le Chardonnay, se retrouve avec le Pinot Noir. Le cépage noble des Bourgogne rouges s’exprime également à merveille sur les mêmes sols calcaires, dans le Jura.
Les cépages rouges, archétypes de fraîcheur
Deux autres cépages autochtones ravissent les amateurs : le Trousseau et le Poulsard (ou Ploussard, « l’important c’est d’en boire »). Ils donnent des rouges infusés, très peu teintés, d’une grande fraîcheur. Ils n’étaient d’ailleurs que rarement pris au sérieux par les natifs de la région. Le Poulsard, cépage délicat à l’instar du Savagnin, a besoin de sols d’argile pour s’exprimer au mieux.
Ces rouges légers pourront convenir à certains poissons, comme un saumon cru ou mi-cuit. Privilégiez des viandes délicates, comme un filet de veau bien rosé. Pour un accord surprenant, pensez à l’amener au dessert, lorsque la saison des fraises arrivera, avec quelques herbes fraîches.
Les différentes appellations et leurs meilleurs acteurs
« Le vin d’Arbois, plus on en boit, plus on va droit ! » Sur l’appellation, Bénédicte et Stéphane Tissot tiennent un domaine de référence. Toutes les cuvées méritent d’être goûtées : crémants, blancs, rouges, jaunes… Le mythique domaine de Jacques Puffeney est devenu le domaine du Pélican. Guillaume d’Angerville, illustre vigneron de Volnay, y produit de très belles cuvées.
Sur le village de Pupillin, Pierre Overnoy et Emmanuel Houillon ont été érigés au rang de légendes. Leurs vins s’arrachent aux quatre coins de la planète. Leurs voisins, Philippe et Tony Bornard, séduit également les amateurs de vins naturels. Chez Chais d’œuvre, nous suivons de près le travail de Julien Mareschal au domaine de la Borde.
À Château-Chalon, outre les vins jaunes, de grands vins ouillés sont produits. Le domaine Macle est une référence. François Rousset-Martin produit également de sublimes cuvées de Chardonnay et Savagnin, pleines d’énergie. Sur l’appellation l’Étoile, on trouve également de beaux domaines. Nicolas Jacob y produit de belles cuvées avec peu d’intrants, par exemple.
Plus au Sud, à Rotalier, Jean-François Ganevat règne sur de superbes parcelles. Ses vins sont devenus des modèles de précision, vinifiés longuement en foudre, sans sulfites, ni filtrations. Le domaine Labet excelle également avec de magnifiques cuvées parcellaires.
Partout dans le vignoble, de jeunes talents émergent et font le dynamisme de cette région. Bruno Bienaimé, Valentin Morel au domaine Les Pieds sur Terre, Jean-Baptiste Menigoz au domaine les Bottes Rouges… Ils suivent la trace de vignerons un peu plus installés, comme Didier Grappe, Etienne Thiebaud au domaine des Cavarodes, Adeline Houillon et Renaud Bruyère, Kenjiro Kagami au domaine des miroirs, entre autres.
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Crédits photos : Pierre-Antoine Cockenpot, Jura Tourisme, Château Bethanie